La Dermatologie au bord du précipice

« La dermatologie traite bien plus qu'une question d'apparence  - la négligence de cette spécialité médicale a des conséquences désastreuses sur la santé et la qualité de vie des malades ».

Marie-France Bru-Daprés, Présidente de l’Association Française pour la Recherche sur l’Hidrosadénite (AFRH)

Dans une tribune publiée dans Le Monde, le samedi 11 mars 2023, la Fédération Française de la Peau, constitué d’un collectif de 21 associations de malades (dont l’AFRH), des sociétés scientifiques savantes de dermatologie et le Syndicat des dermatologues alertent le Ministre de la Santé et les Agences Régionales de Santé sur l'état catastrophique dans lequel se trouve actuellement la dermatologie en France.
Le collectif lance un cri d’alerte pour dénoncer le « silence assourdissant des pouvoirs publics »

Pourquoi les maladies de la peau sont-elles encore absentes des priorités de santé de l'Etat, et notamment des Plans Régionaux de Santé (PRS) ?

La dermatologie est pourtant une spécialité médicale essentielle, qui se trouve actuellement en réelle difficulté, « au bord du précipice », comme le mentionne l’article du « Monde ».
Les principaux facteurs de cet état avancés par la tribune publiée dans « Le Monde » sont la démographie médicale et la désorganisation des soins.

Chaque jour compte pour sauver des vies et soulager la douleur des malades.

Des millions de Français souffrent de maladies de la peau. La pénurie de dermatologues, les délais d'attente prolongés pour les consultations entraînent une charge de travail accrue pour les dermatologues restants, des impacts physiques, psychologiques, sociaux et économiques importants pour les patients et leurs familles, et des pertes de chances inacceptables.

Trouver un dermatologue pour diagnostiquer et traiter les maladies de peau peut être une tâche difficile, voire impossible, pour de nombreux patients. Les délais de rendez-vous sont aberrants, même en cas d'urgence.

La Tribune présente 3 exemple concrets pour illustrer cet état.
- le délai actuel moyen de 8 ans et demi d'errance diagnostique et de souffrances avant de recevoir un diagnostic de maladie de Verneuil.
- les soins requis par l'épidermolyse bulleuse qui sont souvent réalisés par les proches faute de
prise en charge par l'Assurance-maladie,
- les traitements préconisés par les experts restent inaccessibles aux patients atteints de vitiligo.

Conséquences de la désertification médicale pour les maladies de peau


La pénurie de dermatologues
C’est un problème majeur. Selon les chiffres de l'Ordre des médecins, la dermatologie est l'une des spécialités les plus touchées par la pénurie de médecins en France. En outre, plus de la moitié des dermatologues en exercice ont plus de 55 ans, et le nombre d’internes en formation ne permettra pas de stabiliser la situation avant 2041 ! Cette situation est aggravée par le vieillissement de la population et l'augmentation des cas de maladies de la peau.
Soulignons qu’il existe même des départements dans lesquels on ne trouve plus aucun dermatologue. C’est notamment le cas de certains départements ulta-marins, dans lesquels les patients sont encore plus pénalisés qu’en Métropole, car il faut sortir de son île pour pouvoir être pris en charge, ce qui a bien évidemment un coût, le plus souvent non pris en charge. Citons l’exemple ahurissant de Mayotte, département insulaire Français, qui ne compte aucun dermatologue. Ce sont actuellement deux dermatologues Réunionnais qui viennent deux fois par an prendre en charge tous les patients atteints de maladies de peau.

Les délais d’attente
Une étude récente stipule qu'il s'agit de la pire spécialité pour l'obtention d'un premier rendez-vous.
Les dermatologues sont très souvent sollicités, car ils traitent de nombreuses maladies de peau, certaines courantes telles que l'acné, l'eczéma et le psoriasis, mais d’autres également plus rares.
La déshérence dans de nombreuses régions, accentue la difficulté pour les patients de trouver un dermatologue qui accepte de nouveaux patients.
Même dans les zones urbaines où les dermatologues sont plus nombreux, les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous peuvent être vraiment très longs.

Qui et où consulter?


Les patients peuvent également éprouver des difficultés à trouver le dermatologue approprié pour leur condition particulière. Il existe en effet de nombreuses sous-spécialités en dermatologie, telles que la dermatologie pédiatrique, la dermatologie chirurgicale ou la dermatologie cosmétique. Les patients peuvent ne pas savoir quel type de dermatologue ils doivent consulter et risquent de perdre du temps et des ressources précieuses en consultant des professionnels moins concernés par leur pathologie.



Propositions du collectif pour sortir une filière en danger de l'angle mort du système de santé et sauver l’avenir des malades


Pour sauver la filière Dermatologie en danger et l'avenir des malades, le collectif demande la prise en considération de propositions telles qu’une offre hospitalière plus accessible, la formation de plus de dermatologues, le dialogue de gestion entre ARS et hôpitaux, l’incitation des dermatologues à prolonger leur activité professionnelle au delà de la retraite, la valorisation de la télé-expertise et le renforcement et la revalorisation des ressources paramédicales de la filière pour la prise en charge des soins quotidiens du malade. Le collectif demande également le renforcement du rôle et des compétences du premier recours en dermatologie, la généralisation des dispositifs éprouvés et la mise en place de vacations hospitalières par les dermatologues de ville et le déploiement des assistants médicaux. Ces propositions doivent être implémentées rapidement pour sauver la dermatologie.



Nous, malades de la peau atteints d’Hidrosadénite Suppurée / maladie de Verneuil, devons soutenir cette démarche d’alerte du Ministère et des Agences Régionales de Santé. Soyons nombreux à partager cet article !

Liste des signataires de la tribune : 
Marie Beylot-Barry, Société française de dermatologie (SFD); Christine Bodemer, coordinatrice de la filière Santé Maladies rares dermatologiques (Fimarad); Marie-Claude Boiteux, présidente de la Fédération française de la peau (FFP); Nicolas Dupin, ancien président de la SFD; Nicole Jouan, présidente de la Fédération française de formation continue et d’évaluation en dermatologie-vénéréologie (FFFCEDV); Gaëlle Quéreux, présidente de la SFD; Luc Sulimovic, président du Syndicat national des dermatologues-vénéréologues (SNDV).
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